En 2022, Alfred Spira, professeur d’épidémiologie, et Nicolas Leblanc, médecin de santé publique, ont publié un essai intitulé « Santé. Les inégalités tuent ». Dans cet ouvrage, les deux hommes reviennent sur l’impact du milieu social sur la qualité et l’espérance de vie et tentent de dégager des solutions pour les années à venir.
Le constat n’est pas récent et pourtant, la situation semble toujours aussi préoccupante. Les données communiquées par l’INSEE parlent d’elles-mêmes : en France, 13 années d’espérance de vie séparent encore les 5% des hommes les plus pauvres des 5% les plus aisés. Pour les femmes, l’écart est un peu moins important mais atteint tout de même 8 ans.
Dans leur essai, Alfred Spira et Nicolas Leblanc démontrent que ces inégalités sont de trois origines : sociales, tout d’abord, mais aussi territoriales et environnementales. Renforcées par les désordres climatiques et la crise sanitaire due à la crise Covid-19, ces fractures méritent plus que jamais toute notre attention, expliquent les deux auteurs. Mais alors, comment y remédier ? Selon eux, il est urgent d’investir massivement dans la prévention, la recherche et la solidarité.
Un nouveau modèle de développement collectif
Pour que toutes les catégories de la population puissent être égales en matière de santé, c’est tout le modèle social qu’il faut repenser. À commencer par la répartition des fonds accordés à la santé, dont l’immense partie est aujourd’hui dédiée aux soins. Prévenir avant de guérir, voilà ce que préconisent Alfred Spira et Nicolas Leblanc. Concevoir la « sécurité sociale » comme un « outil » pour aider les populations à vivre sainement, et non pas seulement comme une solution pour faire face aux maladies. Les deux hommes proposent à ce titre des solutions concrètes, telles que la création d’un panier alimentaire qui serait garanti pour tous et qui donnerait la part belle aux producteurs locaux.
Il s’agit aussi de miser davantage sur la solidarité, via par exemple l’instauration d’un revenu universel d’existence. L’essai insiste par ailleurs sur le pilotage de telles initiatives par un ministère dédié et sur la nécessaire définition d’un plan transversal. L’État doit prendre ses responsabilités et insuffler un nouvel écosystème dans lequel les inégalités face à la santé seront traitées de manière conjointe avec les enjeux économiques et éducatifs, mais aussi en lien avec l’urbanisme et le logement. En d’autres termes, traiter le problème de manière plus globale et créer du lien à tous les niveaux.